La fabrique du geste
Il reste encore une semaine (jusqu’au 1er mars) pour aller visiter au Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris l’exposition « La fabrique du geste » consacrée au peintre français d’origine allemande Hans Hartung.
Ce peintre fut une des grandes figures de l’abstraction au XXe siècle. Né en 1904 à Leipzig, il commença de composer des œuvres non figuratives (aquarelles et encres) dès 1922, de manière libre et intuitive, sans même connaître les recherches de ses aînés, Kandinsky, Kupka, Mondrian, Malévitch… Après des études d’histoire de l’art en Allemagne où il s’enthousiasmera pour des maîtres comme Le Gréco, Goya ou Rembrandt et les impressionnistes allemands Kokoschka et Nolde, il s’installera à Paris en 1926. Là il découvrira l’art moderne, notamment Picasso, et fera la connaissance de sa future femme, la peintre norvégienne Anna-Eva Bergman. Il retournera à paris dans les années 30 où il fera des rencontres déterminantes avec Goetz, Hélion, Magnelli ou Domela.
Hartung, aquarelle 1922
Après la mort de son père et devant la montée du danger nazi, Hartung vivra quelques années d’errance et finira par s’enrôler dans Légion étrangère française installée en Afrique du Nord. Il prendra part aux combats dans le nord-est de la France et sera blessé en novembre 1944 près de Belfort. Il se verra amputé de la jambe droite. Il sera naturalisé français en 1946, décoré de la Croix de Guerre et sera élevé plus tard au rang de Chevalier de la Légion d’Honneur. Il s’installera définitivement en France à partir de cette date. C’est aussi après la guerre qu’il se fera reconnaître par ses pairs avant d’accéder à la renommée internationale.
T1936-11, 1936
Optant dans les années 30 pour l’abstraction, il se détournera néanmoins de l’abstraction géométrique (dès 1924, après avoir assisté à une conférence de Kandinsky, il refusera tout ce qui lui apparaîtra relever d’un esprit de système). L’abstraction qu’il élabore dans les années d’avant-guerre est tout à fait novatrice. Délaissant toute référence au monde extérieur, Hartung réalise des dessins, parfois les yeux fermés, en laissant le geste exprimer spontanément et librement le contenu le plus secret et le plus intime de son être. Mais gardant ses distances avec le surréalisme, il qualifiera sa méthode de « spontanéité calculée ». Une deuxième phase de sa création consistera alors à reporter soigneusement ces dessins sur la toile par la mise au carreau. Il associe aux traits des masses colorées. Il est alors le précurseur de ce qui deviendra après 1945 l’ « abstraction lyrique ».
T1989-k36 (détail acrylique au pistolet sur toile)
A partir de 1947, au moment de l’apparition en France de ce qui sera nommé un peu plus tard l’ « Art informel » (Michel Tapié, 1951), ses œuvres sont montrées dans les galeries parisiennes, en particulier lors d’une rétrospective qui lui est consacrée à la galerie Lydia Conti. Il est repéré par Charles Estienne et s’entoure d’amis peintres comme Schneider et surtout Soulages avec qui il restera très lié jusqu’à sa mort. Sa réputation à l’international ne fera que grandir jusqu’à l’obtention du prix de la Biennale de Venise en 1960. 1960 est aussi l’année où s’effectue un tournant stylistique majeur puisqu’il décide de s’attaquer directement à la toile, par les pinceaux bien sûr, mais aussi différents instruments qui lui permettent de la gratter et de souffler de la couleur à sa surface. Le graphisme change alors. Le fond du tableau prend une plus grande importance. Les formes en émanent désormais au lieu de s’y inscrire. Il ne cessera d’innover dans les techniques et dans le style. A partir de son installation dans son atelier d’Antibes, les formats s’agrandissent sensiblement. A la fin de sa vie, alors qu’il est en siège roulant, il utilisera une sulfateuse à vigne afin propulser la peinture acrylique sur la toile. Il en résultera de somptueux tableaux faits de projections et de coulures.
Hans Hartung meurt à Antibes, le 7 décembre 1989.
Une interview de Pierre Soulages au sujet d’Hans hartung :
Ci-desssous, le lien vers la présentation de l’exposition « Hartung : la fabrique du geste » sur le site du Musée d’Art Moderne :
http://www.mam.paris.fr/fr/expositions/exposition-hans-hartung
Vous trouverez également à la Médiathèque deux ouvrages consacrés à Hans Hartung :
- « Hartung » de Pierre Daix, Bordas, 1989.
- « Hartung : la fabrique du geste » sous la direction d’Odile Burluraux et Julie Sissia, Paris Musées, 2019 (catalogue d’exposition).