Quelques conseils pour éviter le piège des fake news
Cela fait désormais deux semaines que la Russie a envahi l’Ukraine. Si la guerre fait rage sur le sol, une bataille de l’information a également lieu en ligne. Les réseaux sociaux servent de témoignages et permettent de s’informer ou de découvrir en direct les atrocités de la guerre. Cependant, ces plateformes sont aussi l’occasion de voir se multiplier des infox qui peuvent être instrumentalisées à des fins de propagande, pour nier la réalité de la guerre ou pour désinformer. En effet, des vidéos circulent sur Facebook, Twitter ou TikTok mais il s’agit parfois de contenus antérieurs à la guerre en Ukraine ou coupés afin de faire transformer la réalité en faisant dire autres choses aux images. Dans ce contexte, ce n’est pas toujours évident de s’y repérer. On vous donne quelques astuces pour éviter de tomber dans le piège des fake news.
Croiser les sources
Si vous découvrez une vidéo ou un contenu avec un caractère spectaculaire ou sensationnaliste, la tentation de repartager ou de commenter peut être forte. Une des mécaniques des réseaux sociaux consiste à s’appuyer sur les émotions pour créer une forme d’engagement de l’utilisateur. Avant de réagir, j’essaie de m’assurer de l’authenticité de l’information. Par exemple, si un post annonce la mort d’un haut gradé de l’armée russe, j’identifie la source de cette information : un journaliste, un porte-parole de l’état-major, un chercheur en géopolitique, un expert en OSINT, un compte d’un particulier ? Ensuite, j’essaie de croiser cette information avec d’autres sources. Est-ce que le fait est relaté dans d’autres médias ? Si la publication a suscité des commentaires de la part d’autres internautes, cela peut-être utile de parcourir les commentaires. On peut y trouver des réponses qui apportent des éléments contradictoires.
Qui parle ?
Afin de limiter la propagation des fake news, les plateformes comme Meta, Twitter ou TikTok ont mis en place un système de vérification des utilisateurs. Des labels sont affichés sur certains comptes pour attester de l’authenticité de l’utilisateur. Ce système, qui n’est pas infaillible, vise à garantir l’identité d’un compte. Ainsi, cette information permet d’accorder une relative confiance aux contenus partagés par le compte certifié. De même, certains médias ou organe de presse affiliés à des Etats sont indiqués comme tel par les plateformes des réseaux sociaux. Identifier la filiation entre un organe de presse et un Etat autoritaire qui sanctionne la liberté d’expression est un moyen d’alerter sur le niveau d’indépendance et d’objectivité de l’information qui est partagée. Actuellement, sous l’effet des sanctions internationales, les comptes de certains médias (RT, Sputnik…) sont de plus en plus bloqués sur les réseaux sociaux. Cependant, les utilisateurs peuvent toujours partager des liens d’articles provenant de ces médias. Afin d’attirer l’attention de l’internaute, les réseaux sociaux comme Twitter précisent que l’URL partagée renvoie vers un site qui est affilié à un Etat et montre qu’on risque d’accéder à un contenu qui est susceptible de faire de la propagande.
Analyser le profil d’un compte est également un bon indicateur pour recontextualiser une vidéo ou une photo partagée. Est-ce un vrai compte ou un compte créé à des fins de propagande ? Depuis quand existe-t-il ? Des éléments de biographie sont-ils disponibles ? Y a-t-il une photographie de profil ? Si oui, est-ce une véritable photo ou une trouvée sur le web ? Je peux le savoir en enregistrant l’image et en faisant une recherche d’image inversée (voir ci-dessous). Le compte a-t-il des abonnés ? Quels sont les comptes auxquels il est abonné ? Enfin, quelles sont ses autres publications et à quelle fréquence ? Toutes ces informations peuvent aiguiller et aider à identifier si c’est un compte fictif ou non.
Recherche image inversée
Une image peut facilement être sortie de son contexte et donner un sens opposé. En outre, des photos plus anciennes sont parfois réutilisées pour créer des fake news. Dans le cadre de la guerre actuelle en Ukraine, une photo d’un autre conflit armé pourrait induire en erreur. Afin de s’assurer de l’authenticité d’une photo, il est recommandé d’utiliser un moteur de recherche d’image inversée. Nous vous recommandons le service TinEye qui permet d’effectuer une recherche d’images et de trouver le nombre d’occurrences référencées en ligne. Ainsi, on peut se rendre compte que certaines photographies vieilles depuis plusieurs années peuvent ressortir. Certaines sont utilisées à des fins légitimes tandis que d’autres visent à tromper les internautes.
La manipulation visuelle est fréquente dans la conception d’une fake news. C’est pourquoi il est important d’observer les détails qui peuvent trahir. Par exemple, sur une photographie qui est supposée mettre en scène un événement qui s’est produit dans une ville X, est-ce que je peux voir sur la photographie des inscriptions qui confirme ou pas (une devanture, une façade, un panneau de signalisation, la plaque d’immatriculation…). Si une donnée textuelle est présente sur la photographie, le texte est-il écrit à l’envers ?
L’observation et l’analyse détaillée peuvent aider à déterminer la localisation de la photographie et par conséquent de débusquer une éventuelle fake news. D’autres méthodes plus élaborées peuvent être mises en œuvre en s’appuyant sur une route, un bâtiment, un paysage. Mais cela nécessite plus de temps et d'investigation. Si le renseignement en sources ouvertes (OSINT) vous intéresse, on vous recommande cet article où nous présentons des outils pour débuter.